En grandissant je n’ai jamais été ce qu’on peut qualifier de menue. En général, j’étais plus grande que tout le monde, les garçons y compris, et ma puberté précoce m’a aidé à m’empâter tout au long de ces “années de mal être”.
En même temps que mes nombreux souvenirs heureux d’enfance se trouvent ces souvenirs pas aussi joyeux qui ne m’ont jamais totalement lâchée : être harcelée à l’école primaire parce que j’avais l’air d’être enceinte, qu’on me rappelle de “rentrer le ventre” ou aller faire du shopping avec des amies et être embarrassée parce que j’avais besoin d’une taille plus grande. Ces souvenirs et les rappels constants de faire un régime et du culte du corps n’ont fait que marquer le début d’une spirale qui m’ont rapidement fait chuter dans l’anorexie.
Perdre du poids et perdre le contrôle
Les choses ont vraiment débuté quand j’ai commencé l’université. A ce moment-là de ma vie, je me suis mise à la course à pieds et aux exercices physiques plus vigoureux. J’ai commencé à perdre du poids, les garçons faisaient plus attention à moi et certains m’ont même demandé de sortir avec eux!
À un moment donné, j’ai voulu manger un peu plus sainement. Mais au bout de quelques années et après avoir suivi des régimes aléatoires “à la mode” ici et là, je me suis mise dans la tête que de compter les calories, d’éliminer autant de gras que possible et de ne pas manger de glucides était ce qui me ferait être en bonne santé et m’aiderait à continuer de perdre du poids. En fait, j’aimais ça, d’additionner les calories que j’avais brûlées pendant une séance d’exercices, le matin, et d’essayer de manger moins que ça pour le petit déjeuner et le déjeuner. Je commençais à compter non seulement mes calories et à me limiter par rapport aux choses que j’aimais, mais j’ai aussi commencé à comparer ce que je mangeais avec ce que les autres mangeaient. Dans mon esprit, pour rester plus maigre que les autres, il fallait manger moins qu’eux.
Lorsque je me suis mariée, j’ai aussi déménagé dans un nouvel Etat, loin de toute ma famille et j’ai commencé un nouvel emploi qui était loin d’être idéal. J’étais constamment démolie au travail et j’avais le syndrome du «Sois donc parfaite», à cause duquel j’avais le sentiment que pour être une bonne épouse, je devais littéralement être parfaite. Je devais toujours garder ma maison impeccable, préparer des dîners extravagants tous les soirs, aller bien au-delà de la normale lorsque je recevais des gens chez moi et avoir toujours de la pâte à biscuits à portée de main pour pouvoir toujours avoir des biscuits faits maison fraîchement sortis du four.
Avec le chaos de mon travail et la pression de devoir être irréprochable, la nourriture est devenue la seule chose dans ma vie que j’avais l’impression de pouvoir contrôler. Je continuais à augmenter mon taux d’exercices physiques tout en diminuant ce que je mangeais. Quand j’avais trop faim le soir, je me jetais parfois sur ces choses que je ne m’autorisais pas à manger pendant la journée. Je voulais me rendre tellement malade que je ressentirais le besoin, le lendemain, de me punir pour ce que j’avais fait. C’est devenu un cercle vicieux de faim, de boulimie, puis de recommencer à m’affamer de nouveau.
J’étais épuisée émotionnellement et physiquement, et, à cette époque, je n’ai pas vraiment réalisé à quel point mon obsession avec la nourriture affectait ma relation de couple. Je devenais l’esclave de mes pensées sur la nourriture et le sport. Mon obsession d’être “en forme” m’a mené à devenir dangereusement sous-alimentée et totalement en mauvaise santé.
Même quand j’ai changé de travail et que je me suis retrouvée dans un environnement beaucoup plus heureux et rempli d’amour, j’étais piégée dans mon état d’esprit nocif et je n’arrivais pas à reprendre complètement le dessus sur mon obsession. Je savais que je ne pouvais pas continuer à vivre comme ça, que je devais reprendre le contrôle et redevenir vraiment heureuse.
Essayer de changer
Lorsque ma situation de travail était difficile, je me souviens être rentrée un jour à la maison en voiture et avoir vu des centaines de jonquilles depuis l’autoroute. C’était un petit signe pour moi de continuer à persévérer dans cette expérience de travail. Ce petit miracle s’est produit à nouveau plus tard dans ma vie, lorsque j’en ai eu le plus besoin.
Au moment où les choses étaient si sombre et solitaires quand j’ai perdu le contrôle sur mes troubles alimentaires, je me souviens avoir supplié mon Père céleste, nuit et jour pour qu’Il m’aide. Pendant un moment, je commençais à penser qu’Il ne m’écoutait pas et que j’étais encore plus seule que je ne le pensais. Un jour, pendant que je courais le long d’un de mes itinéraires favoris, j’ai prié de nouveau mon Père céleste et je Lui ai carrément demandé s’Il se souciait de moi. Lorsque j’ai terminé ma prière et que j’ai levé les yeux de la route, j’ai vu un champ de jonquilles. Ces fleurs étaient la réponse à mes prières. C’était un moyen simple que notre Père céleste a utilisé pour me dire qu’Il m’aimait et qu’Il répondait à mes prières.
Lorsque j’ai appris à connaître, comprendre et acquérir un témoignage que l’Expiation existe non seulement pour ceux qui ont péché, mais aussi pour tous ceux qui ont le cœur brisé et qui ont des difficultés, j’ai décidé de donner mon fardeau au Christ et de le laisser m’aider. Avec l’aide de plus de prières, de supplications, d’aide psychologique et de soutien des autres, j’ai commencé à progresser petit à petit.
Peu à peu, et douloureusement, j’ai commencé à prendre du poids. C’était difficile, mais mon mari me disait tout le temps que j’avais l’air très bien et qu’il aimait de plus en plus mon corps. Tout le monde autour de moi me disait que j’avais l’air en meilleur santé et plus heureuse.
Même si mon corps et ma santé globale étaient en train de changer, et que mon témoignage était de plus en plus fort grâce à l’Expiation, je trouvais qu’il était toujours difficile de changer ma vision des choses. Je suis tombée sur une histoire qui m’a aidé à me rendre compte que je gaspillais des moments et des années précieuses de ma vie à insister sur quelque chose qui n’avait vraiment pas d’importance. Et c’est là que je me suis fait la promesse à moi-même de ne plus perdre de temps avec des choses sans importance.
Pour m’aider à affronter la vérité que je savais au plus profond de moi, je me suis écrit cette lettre :
Change tes habitudes, sois en meilleure forme et plus heureuse!
Tu es vraiment une belle femme, étonnante, et une fille de Dieu, capable de tellement de choses merveilleuses! Tu as vu à quel point tu es un exemple pour les élèves que tu as enseignés, pour tes sœurs, pour les filles de ta paroisse que tu aimes tellement, et pour tant d’autres que tu ne connais peut-être pas encore ou qui vont bientôt arriver. Pense à tes futures filles et à l’exemple que tu peux leur montrer. Tu te souviens lorsque tu courais avec ta sœur et que tu pleurais parce que tu ne voulais que personne ne se sente jamais comme tu t’es sentie? Eh bien, voilà ta chance d’être forte et d’être heureuse!
La nourriture n’est pas l’ennemi! La nourriture a toujours été l’une de tes meilleures amies. Oui, tu peux manger des céréales, des sundaes, de la glace et des desserts! Ne te prive pas de ce que tu aimes et ne les laisse pas venir te hanter pour se venger, ce qui te ferait te sentir malade, amoindrie, moins confiante et pas belle. Ce n’est pas la toi que je connais!
La toi que je connais est auto-disciplinée, en bonne santé, elle a confiance en elle, elle se soucie véritablement des autres, elle est organisée, elle se donne à fond et elle est vraiment belle à l’intérieur et à l’extérieur. Tu te rappelles lorsque ton mari t’a regardé comme s’il n’avait jamais aimé quelqu’un d’autre au monde autant que toi et qu’il trouvait que tu étais tellement belle qu’il ne pouvait pas le cacher dans ses yeux ou dans son regard et le sourire qu’il t’a fait? Est-ce que ça s’est passé quand il regardait ton corps ou lorsque tu pensais et que tu ressentais que tes abdos étaient plats? NON!! Ça s’est produit après qu’il t’ait vu servir les autres et t’occuper des autres. C’est quand tu as arrêté de te soucier de toi-même et que tu as pensé aux autres et que tu t’es laissée être vraiment heureuse!
Pour cette nouvelle année, je sais que tu as besoin de faire des changements. Nous devons briser cette habitude de goinfrement émotionnel pour pouvoir tout simplement profiter de la vie et des possibilités qu’elle nous donne, et être vraiment heureuses! Commençons ici et dès maintenant notre chemin pour casser tout ça!
Tu sais que tu t’aimes toi-même et que tu es reconnaissante pour le corps qui t’a été donné et le merveilleux soutien que tu as de tes amis et de ta famille qui t’entourent. Dans cinq ans, est-ce que tous ceux que tu rencontres vont se souvenir de ta taille ou de ton poids? Est-ce que toi, tu vas t’en souvenirs? Pour quelles raisons est-ce que tu veux qu’on se souvienne de toi et qu’est-ce que tu veux avoir comme souvenirs et bons moments?
N’attends pas jusqu’à ce que tu sois prête à mourir pour vraiment apprendre à vivre!
Trouver une perspective
Après avoir terminé cette lettre à moi-même, j’ai reçu mon dernier “signal d’alarme” lorsque mon mari et moi avons commencé à parler plus sérieusement d’avoir des enfants. Je me suis rendu compte que ce que je faisais subir à mon corps ne m’affectait pas seulement moi; cela était néfaste et entravait mes chances éventuelles d’avoir un bébé.
Je me suis immédiatement concentrée sur autre chose que moi-même et ce que je mangeais, dans le but de faire tout ce que je pouvais pour être en bonne santé et aider mes futurs enfants à être aussi en bonne santé et heureux. J’ai levé le pied avec les exercices; J’ai mangé davantage et j’ai donné à mon corps ce dont il avait besoin pour être plus fort. En faisant tout cela, je me suis rendue compte que je n’étais pas devenue «grosse» comme je l’avais toujours craint. Je suis devenue beaucoup plus heureuse, bien plus confiante dans mon corps et beaucoup plus proche de la personne que mon Père céleste et mon Sauveur ont toujours su que je pouvais être.
Après plusieurs mois d’inquiétude quant à savoir si oui ou non je pourrais avoir un bébé, j’ai découvert que j’étais enceinte! Mon cœur était déjà rempli de tant d’amour pour ce petit être humain qui était à l’intérieur de moi.
Un an avant ce moment-là, si vous m’aviez dit que j’aurais dû prendre 12-15 kilos pendant ma grossesse et peser plus que mon mari, je me serais effondrée. Cela a été un miracle pour moi de savoir que ma propre vie avait de la valeur et que celle qui grandissait en moi signifiait tellement plus qu’un chiffre sur une balance. Mon bébé a été bien plus qu’une bénédiction dans ma vie, que ce que j’aurais pu imaginer!
Quand j’ai vraiment compris que ce que je faisais subir à mon corps ne me nuisait pas seulement à moi, ça a TOUT changé! Rappelez-vous seulement de ça, on ne peut pas contrôler ce que les autres font et pensent, mais on peut essayer de toutes ses forces d’être le/la meilleur/e et le/la plus heureux/se qui soit. Ça on peut le contrôler.
Tendre la main aux autres et les pousser vers le haut
Pendant cette période, j’ai lu un discours de Jeffrey R. Holland intitulé “Aux jeunes filles” qui m’a aidé à consolider ma détermination à m’aimer et à aider les autres à ne pas passer par ce que je suis passée. Dans ce discours, Elder Holland a dit :
” Je vous supplie, jeunes filles, de mieux vous accepter vous-mêmes, notamment la forme et le type de corps que vous avez, en rêvant un peu moins de ressembler à quelqu’un d’autre. Nous sommes tous différents. Certains sont grands, d’autres petits. Certains sont ronds, d’autres minces. Et presque tout le monde, à un moment ou à un autre, veut être quelque chose qu’il n’est pas !
… En termes de préoccupation de soi et de fixation sur le physique, c’est plus que de la folie sociale ; c’est de la destruction spirituelle et cela explique une grande partie des malheurs que les femmes, et notamment les jeunes filles, affrontent dans le monde moderne. Et si des adultes sont préoccupés par leur apparence – faisant des implants, du lifting et modifiant tout ce qui peut l’être – ces pressions et ces inquiétudes s’infiltreront certainement jusqu’aux enfants. …On aurait vraiment besoin d’une trousse de maquillage grande et spacieuse pour concurrencer la beauté telle que la représentent les médias tout autour de nous”.
Comprendre véritablement et savoir que je suis une fille de Dieu avec un potentiel divin pour la maternité m’ont aidé à vaincre mes troubles alimentaires. Grâce au pouvoir de l’Expiation et à l’amour de mon Sauveur pour moi, et à tout ce que j’ai vécu, je sais que j’ai le pouvoir de surmonter tous les obstacles – même ceux qui se trouvent à l’intérieur de moi.
par Eve Harper, article publié le 5 janvier 2016, sur LDSLiving.com
Un très touchant témoignage qui je crois aidera beaucoup de jeune et moins jeune femme et surtout des filles de Dieu !