Quand la réponse à une prière est « pas encore », il est réconfortant de se souvenir des tendres miséricordes du Seigneur.
La première fois que j’ai vu la photo, j’ai pleuré. J’étais mariée depuis un an et demi. Nous essayions de concevoir depuis environ six mois, sans succès. Et j’avais à nouveau mes règles. (N’hésitez pas à arrêter là votre lecture si certains aspects de la reproduction humaine vous affolent. Je ne vais pas mâcher mes mots aujourd’hui).
J’avais mes règles, ce qui voulait dire qu’un autre mois était passé sans que je tombe enceinte. J’étais vraiment déprimée.
De nombreux aspects de l’infertilité sont désespérément ironiques. Le fait que les hormones féminines soient détraquées juste à temps pour que votre corps réaffirme que vous êtes, encore une fois, inféconde en éliminant sa muqueuse utérine sans bébé, est l’une de ces cruelles ironies. La déception de ne pas réussir à concevoir est aggravée par la cacophonie émotionnelle de la menstruation.
Voici quelques autres de ces cruelles ironies, mais cette liste n’est pas exhaustive :
- Les règles sont accompagnées des mêmes symptômes qu’un début de grossesse. Gonflement, irritabilité, crampe, boutons, seins douloureux, ils peuvent tous indiquer un syndrome prémenstruel. Ou un tout début de grossesse. Comment est-ce censé nous aider ? Merci, Mère Nature pour ces messages si faciles à déchiffrer !
- Cycles irréguliers. Ils sont tellement pénibles. Ai-je trois jours de retard parce que j’ai un zygote dans mon utérus ? Ou ai-je juste trois jours de retard parce que j’ai fait plus de sport ce mois-ci ? Est-ce que je vais commencer à saigner d’un moment à l’autre, ou est-ce qu’un bébé va grandir en moi ? C’est totalement différent, mais vous ne pouvez pas en être certaine avant d’avoir irrémédiablement tâché vos sous-vêtements.
- Tout le monde vous dit de vous détendre. Selon tous les gynécologues de salon incompétents, vous ne pouvez pas tomber enceinte à moins d’être complètement zen. Qui ça intéresse que je tombe enceinte ? Pas moi. Eh bien, ça ne marche pas pour mon corps non plus. Je pense que je vais continuer à surveiller mes cycles et à boire des infusions à la framboise ou à je ne sais quoi, merci bien. Au moins, j’ai l’impression d’avoir le contrôle sur la situation.
- Vous ne pensez qu’à cela, mais le sujet est trop « tabou » pour en parler. Essayer d’avoir un enfant accapare votre vie. Vous avez des rendez-vous chez le médecin, vous prenez des médicaments, et vous surveillez votre cycle. Mais peu importe la place que le processus prend, vous ne pouvez pas en parler. Les gens se sentent mal à l’aise et changent de sujet, ou vous accuse de trop en dire, alors vous apprenez à souffrir en silence.
Mais cette fois, je ne pleurais pas à cause de la nature contradictoire de l’infertilité. Je pleurais parce que j’avais tant besoin de ce rappel des tendres miséricordes de Dieu envers moi.
Les bénédictions que vous avez maintenant
À une époque, je n’aurais jamais imaginé être en mesure de fonder une famille. Je pensais vraiment que j’étais destinée à devenir un « ange chargé d’un ministère ». Je n’ai pas embrassé de garçon avant mes 21 ans. Ma première relation amoureuse a duré une longue semaine. À côté de cela, je n’ai eu que quelques premiers rendez-vous gênants.
J’ai imploré le Seigneur de nombreuses nuits qu’il m’envoie un compagnon digne, que je pourrais aimer et qui m’aimerait en retour. L’homme qui deviendrait mon mari est rentré de mission peu de temps après. Il était vraiment une réponse à mes prières.
Aujourd’hui, après deux ans de mariage, nous essayons encore de concevoir un enfant. Nous prenons très au sérieux le commandement de « multiplier et remplir la terre ». Sans compter que nous voulons sincèrement un enfant. Nous nous aimons profondément, et nous croyons pouvoir offrir un bon foyer heureux et centré sur l’évangile à un enfant de Dieu. Nous voulons participer à l’œuvre sacrée de la création.
En plus les bébés sont adorables. Il suffit de regarder une petite bouille joufflue pour comprendre notre motivation.
Juste un brin de jalousie
Pendant ce temps, la famille et les amis se reproduisent comme des lapins. Nous sommes à ce stade de la vie où la plupart de nos proches sont en train de fonder une famille, et chaque fois qu’un couple annonce une nouvelle grossesse, je suis réellement heureuse pour lui. Et honteusement jalouse.
Je connais le commandement qui dit que nous ne devons pas convoiter. J’aime croire que ma jalousie est loin d’être de la convoitise Je ne voudrais pour rien au monde amoindrir leur bonheur. Je veux que les autres reçoivent ces bénédictions. C’est juste que je les veux pour nous aussi.
Le péché de convoitise s’insinue probablement en moi de temps en temps quand des amies non mariées tombent enceintes. Je ne peux pas m’empêcher d’être amère. Nous avons tout bien fait, dans le bon ordre. J’ai terminé mes études, puis nous nous sommes mariés, puis nous avons essayé d’avoir un enfant. C’est un effort conscient. Je fais des tests pour savoir quand j’ovule, nous avons des rapports sexuels programmés, j’évite les boissons sucrées et caféinées, je fais du sport au moins trois fois par semaine. Pourtant, il y a des femmes qui tombent enceinte par accident. Comment est-ce possible ?
Reconnaître la main du Seigneur
Malgré tout, je me rappelle à moi-même que le Seigneur sait ce qu’il fait. J’essaie d’avoir confiance en son calendrier. Je repense au temps où je croyais que trouver un mari était impossible. Le Seigneur s’est occupé de moi. Il connaît ma vie intimement.
Je vois sa main en action tout le temps. Il m’envoie les gens dont j’ai le plus besoin, en particulier la bonne instructrice visiteuse au bon moment. Mon instructrice visiteuse a souffert d’infertilité pendant des années. Aujourd’hui, elle a trois magnifiques enfants. Elle a été d’un grand secours pour moi parce qu’elle accepte de parler de ses expériences et elle m’aide à passer cette période de ma vie.
Elle m’a indiqué le bon gynéco, un médecin qui comprend que fonder une famille coûte cher et pense que l’argent ne doit pas être un frein. Nous sommes de pauvres jeunes étudiants. Nous pensions que le traitement contre l’infertilité serait hors budget pour nous (nous n’en avons quasiment pas). Cette sœur et ce médecin qu’elle nous a indiqué nous ont permis de passer à l’étape suivante de notre parcours.
Tentative de changement
L’étape suivante se présente sous la forme d’un médicament appelé Clomid. Le Clomid agit sur la production hormonale et entraîne la production de plusieurs ovules à chaque cycle, augmentant ainsi les chances de tomber enceinte. À cause de fortes réactions à des pilules contraceptives hormonales, j’ai peur de tout ce qui peut provoquer des changements hormonaux.
En fait, les traitements contre l’infertilité en général me font peur, mais cette peur n’est rien par rapport à celle d’être cataloguée « infertile », les deux allant de pair quand vous faites appel à un professionnel. Avant d’aller voir mon nouveau gynéco, je refusais de voir un lien entre nos expériences et l’infertilité. Mais quand j’ai pris notre premier rendez-vous, on m’a demandé la raison de notre visite ; quand j’ai répondu à la réceptionniste que nous essayions d’avoir un enfant depuis un an, elle a répondu qu’elle allait fixer une consultation pour infertilité.
L’infertilité : un état, pas une condamnation à mort
Infertilité ? J’ai des frissons quand j’entends ce mot. Ne faut-il pas passer des tests pour faire ce diagnostic ? L’infertilité, cela semble si définitif. Ça n’a pas l’air du genre de chose pour lequel il existe un traitement. Ça a l’air du genre de chose que l’on doit gérer, que l’on déplore.
J’ai découvert que les professionnels de santé parlent d’infertilité quand vous n’avez pas réussi à concevoir ou à maintenir une grossesse pendant douze mois consécutifs. C’est juste un terme qu’ils utilisent pour les couples qui ont besoin d’aide pour concevoir.
Il y a beaucoup de désinformations au sujet de l’infertilité parce qu’on évite d’en parler ouvertement et honnêtement. Tout d’abord, c’est très commun. Selon womenshealth.gov une femme sur dix sera confrontée à l’infertilité.
Dans la plupart des cas, l’infertilité se traite très bien. L’association d’un traitement hormonal, de rapports sexuels programmés et de tests pour diagnostiquer et traiter les causes sous-jacentes, déclenche généralement à une grossesse.
Les représentations sont à côté de la plaque
Les médias populaires veulent nous faire croire de l’infertilité est un épilogue. Il me vient à l’esprit trois tentatives assez récentes de décrire l’infertilité à l’écran, elles représentaient toutes des femmes totalement incapables de procréer.
Dans la série télévisée How Met Your Mother, Robin Scherbatsky, découvre qu’elle ne peut pas avoir d’enfants. On l’a vu pendant un épisode et demi digérer la nouvelle, puis on n’en a presque plus entendu parler. Dans la réalité, on ne règle pas son infertilité en un jour.
De même, dans la suite de la série des années 90, La fête à la maison : 20 ans après, Stephanie Tanner révèle qu’elle n’aura jamais d’enfants. Ces deux exemples sont à côté de la plaque, parce que la plupart des femmes ne découvriront pas leur incapacité à avoir des enfants après seulement un rendez-vous chez le gynécologue. L’infertilité est tellement plus compliquée que cela dans la vraie vie.
Enfin, l’exemple le plus populaire, Natasha Romanoff (alias la Veuve noire) des Avengers de Marvel, stérilisée de force, déclenchant diverses conversations en ligne sur l’infertilité. Malheureusement, aucun de ces exemples n’ont de rapport avec l’infertilité. Ce sont des exemples de stérilité, ce qui est assez rare.
J’aimerais, juste une fois, voir quelque chose qui présente correctement ce qu’est l’infertilité. Je veux voir Robin Scherbatsky passer une série d’échographies pour voir si ses trompes de Fallope ne sont pas obstruées. Je veux voir Stephanie Tanner tenter plusieurs fécondations in vitro. Je veux que Natasha Romanoff trouve une donneuse d’ovocyte ou une mère porteuse ou qu’elle réfléchisse à l’adoption.
J’aimerais que l’infertilité soit dépeinte comme un parcours, un arc, parce que c’est ce qu’elle est. Ces histoires mèneraient les personnages quelque part plutôt que de les vouer à une fin malheureuse. Plus important encore, elles décriraient la dure réalité vécue par des centaines de milliers de couples qui cherchent de l’aide pour surmonter leur infertilité.
On devrait raconter de vraies histoires
En règle générale, notre culture passe sous silence les vraies histoires de couple qui souffrent d’infertilité, mais cela ne rend service à personne. Nous devons mettre en lumière des expériences telles que celle de Shanalynn Smith, une femme de 36 ans résidant en Utah qui fait régulièrement des fausses couches. Elle explique que le plus dur dans son parcours jusqu’à maintenant est de voir les tests de grossesse positifs et de savoir que ça ne va pas durer longtemps.
Pendant plus de sept ans, Shanalynn a essayé plusieurs traitements cliniques contre l’infertilité. Nombre de ces essais ont déclenchés des grossesses qui se sont terminées en fausses couches. Elle dit de ses expériences : « J’essaie tellement d’être heureuse, mais parfois c’est difficile et c’est une souffrance ».
Elle réussit quand même à trouver du positif dans son épreuve. « Je suis devenue plus compatissante envers les autres et leurs difficultés », raconte-t-elle, « particulièrement quand j’apprends que quelqu’un fait une fausse couche. J’ai mal pour eux, et je veux faire mon possible pour les aider ». En plus de cette mesure supplémentaire de compassion, Shanalynn explique que les liens qui l’unissent, elle et son mari, se sont resserrés, et c’est une conséquence pour laquelle elle est reconnaissante.
Elle conclut : « Je crois qu’en fin de compte, ma relation avec mon Sauveur sera encore plus forte ».
Les fausses couches à répétition comme celles de Shanalynn sont une des formes cruelles d’infertilité. Cependant, chaque cas est différent mais ils sont tous tout aussi accablants.
Par exemple, Kaiti (elle préfère être appelée uniquement par son prénom), 28 ans, a fait plusieurs grossesses extra-utérines causées par une infertilité tubaire. La grossesse extra-utérine se produit lorsqu’un embryon se développe en dehors de l’utérus. La grossesse ne peut alors pas évoluer normalement et la vie de la mère est menacée. La grossesse n’est pas viable et doit être interrompue.
Kaiti, qui essayait depuis un an déjà de concevoir, à cause du Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) et avait réussi à tomber enceinte grâce à un médicament appelé Femara, a dit qu’elle n’arrivait pas à croire que la première fois qu’elle a ovulé, elle est tombée enceinte, malheureusement, il a fallu que ce soit une grossesse extra-utérine.
Souffrir en silence
Kaiti explique que cette grossesse qui n’a pas abouti l’a menée à la dépression. Elle raconte : « Ça m’a brisée. Pendant trois mois j’étais dépressive et j’ai suivi une thérapie ».
Pendant cette période, Kaiti a réalisé qu’il y avait peu d’endroit où elle pouvait discuter de ses difficultés. « On ne parle pas assez d’infertilité », m’a-t-elle dit, « Les gens peuvent annoncer à tout le monde une grossesse, et publier plein de choses en ligne sur l’arrivée d’un nouveau bébé, mais j’ai eu l’impression que je ne devais rien dire parce que personne ne veut entendre parler des épreuves telles que l’infertilité. J’ai souffert en ‘silence’ pendant longtemps ».
Pour de nombreuses personnes, le manque de discussions autour de l’infertilité les amène à se sentir isolés et seuls. Selon Psychology Today, la solitude a « des effets sur le cerveau et le corps », ce qui engendre davantage de stress, moins de motivation et un taux plus élevé de dépression.
Ceux d’entre nous qui connaissent des problèmes liés à la fertilité ont besoin de personnes réconfortantes pour parler de leurs expériences. Nous avons besoin d’être entendus dans notre société. Nous avons besoin de gens comme ce couple d’Idaho qui a attiré l’attention sur leur expérience de façon très originale, et expliqué comment le rire peut aider à guérir. Nous avons besoin d’entendre les histoires de ceux qui expérimentent le parcours émotionnel, physique et moral des traitements de l’infertilité. Et nous avons particulièrement besoin que ceux qui ont eu des enfants après les traitements racontent leur histoire pour que notre société commence à voir que l’infertilité est un état pouvant être traité.
Nous devons parler d’infertilité.
Avez-vous souffert d’infertilité, ou connaissez quelqu’un à qui cela est arrivé ? Racontez-nous votre histoire dans les commentaires ci-dessous.
Article écrit par Michelle Knabe pour mormonhub, sous le titre We need to talk about infertility. Traduction par Christine.