Le Livre de Mormon contient-il des erreurs?

Article publié le 3 janvier 2016 sur ldsmag.com

“Et maintenant s’il y a des fautes, c’est la faute des hommes; c’est pourquoi ne condamnez pas les choses de Dieu” (Le Livre de Mormon, page de titre, édition de 1830).

Le savoir

La page de titre du Livre de Mormon, traduit par Joseph Smith, se termine par un avertissement plutôt singulier pour un livre d’Écritures : “Et maintenant s’il y a des fautes, ce sont les erreurs des hommes; c’est pourquoi ne condamnez pas les choses de Dieu, afin d’être trouvés sans tache devant le siège du jugement du Christ”.

Le Livre de Mormon, de son propre aveu, n’est pas un texte parfait. C’est une chose sur laquelle les auteurs et ceux qui ont compilé ce livre ont fréquemment insistée (1 Néphi 19: 6; Mormon 8:12, 16-17; Mormon 9:31; Ether 12:23- 25).

Bien que les principes de l’Évangile de Jésus-Christ contenus dans le Livre de Mormon restent corrects, le texte lui-même a souffert de quelques problèmes non seulement dans son écriture initiale faites par les prophètes d’autrefois, mais aussi dans sa transcription, sa composition et sa transmission d’une édition à l’autre dans les derniers jours.

Malgré tout, comme Wilford Woodruff l’a écrit en 1841 : “Joseph a dit que le Livre de Mormon était le plus correct de tous les livres de la terre et la clef de voûte de notre religion, et qu’un homme se rapprocherait davantage de Dieu en en suivant les préceptes que par n’importe quel autre livre”.

Beaucoup se sont demandés comment cela pourrait être le cas, s’il y avait d’éventuelles erreurs commises dans l’histoire textuelle du livre. Le chercheur saint des derniers jours, Hugh Nibley, a répondu à cette question en distinguant entre le message du Livre de Mormon et les “détails mécaniques” de son impression :

Joseph Smith … a proclamé que [le Livre de Mormon] est le livre le plus correct sur​​ terre. Le plus correct, dans quel sens? … Qu’est-ce qu’un livre “correct”? Celui  qui a des marges bien délimitées, une reliure adéquate, un glossaire efficace et dont les pages sont numérotées avec précision? Pas du tout; ce ne sont-là que de simples détails mécaniques, comme le sont également la ponctuation, l’orthographe et même la grammaire – ces sujets sur lesquelles les critiques du Livre de Mormon ont fait toute une histoire. (Hugh Nibley, Since Cumorah, The Collected Works of Hugh Nibley: Volume 7 (Provo: FARMS, 1988), 8.)

Il semble clair que le Livre de Mormon est le “livre le plus correct sur terre”, car en vivant et en mettant en pratique ses enseignements dans notre vie, nous pouvons nous rapprocher davantage de Dieu que par n’importe quel autre livre.

Dans une révélation donnée au Prophète en 1832, le Seigneur a expliqué que les membres de l’Eglise “resteront sous cette condamnation jusqu’à ce qu’ils se repentent, se souviennent de la nouvelle alliance, c’est-à-dire le Livre de Mormon et les précédents commandements que je leur ai donnés, non seulement à prêcher, mais à pratiquer selon ce que j’ai écrit” (Doctrine et Alliances 84:57, italiques ajoutés).

Ainsi, la «justesse» du Livre de Mormon, de même que pour d’autres Ecritures sacrées, ne se trouve pas dans une perfection mécanique ou verbale présupposé, mais plutôt dans le pouvoir de transformation qu’il détient, de corriger et de guider la vie de ceux qui le lisent et qui suivent ses enseignements.

Cela étant dit, un examen attentif des manuscrits et des différentes éditions imprimées du Livre de Mormon aident les lecteurs à apprécier la véritable intégrité de son texte. Ce genre d’examen scientifique d’un texte est appelé “étude analytique”.

Travailler pour produire une “étude analytique” du texte du Livre de Mormon, ou la découverte de l’histoire textuelle du Livre de Mormon en anglais, a été un domaine particulièrement fructueux de la recherche universitaire pour les saints des derniers jours. Les premiers travaux effectués par ces chercheurs ont montré la voie pour l’analyse des changements sélectionnés dans le Livre de Mormon en anglais tout au long de l’histoire de sa transmission.

Après plus de 25 ans de recherches, Royal Skousen, un professeur de linguistique et de langue anglaise à l’Université Brigham Young, a écrit un ouvrage, en plusieurs volumes entièrement consacré à l’étude analytique du texte du Livre de Mormon.

Le travail de Skousen a donné lieu à des contributions telles que la publication en 2001 des transcriptions des manuscrits originaux et des manuscrits de l’imprimeur du Livre de Mormon, son édition de 2009 du Livre de Mormon des presses universitaires de Yale, quatre mille pages d’analyse de presque toutes les variantes non-grammaticale d’un texte à l’autre, et la publication en 2015 d’une édition photographique du fac-similé du manuscrit de l’imprimeur du Livre de Mormon dans les documents de Joseph Smith.

Grâce au travail de Skousen nous nous rapprochons non seulement beaucoup du texte original du Livre de Mormon tel qu’il a été dicté par Joseph Smith, mais nous pouvons aussi identifier plus précisément qu’auparavant quand et comment les changements et les erreurs ont été commises – que ce soit intentionnellement ou non – lorsque le Livre de Mormon a été initialement copié, mis en page et imprimé en 1829-1830.

Le pourquoi

Cette analyse est impressionnante et utile pour de nombreuses raisons. Détailler tous les résultats des travaux volumineux de Skousen va bien au-delà de la portée de ce bref article. Néanmoins, de manière générale, en plus d’identifier les changements dans le texte du Livre de Mormon, les recherches de Skousen ont révélé trois découvertes majeures liées au texte du Livre de Mormon qui méritent d’être mises en évidence. Tel que Skousen lui-même l’a expliqué dans un article de 2012 :

J’en ai conclu qu’il y a trois constats importants découlant du projet de l’analyse du texte du Livre de Mormon. Le premier est que Joseph Smith a reçu le texte en anglais mot à mot, qu’il a lu à son secrétaire. Le deuxième constat est que le texte anglais lui-même a été formé très précisément; là où l’on trouve une erreur textuelle du fait de sa transmission, la première transcription est, de manière générale, la transcription la plus précise. Le troisième constat est l’identification de 256 modifications du texte qui font une différence dans la signification ou dans l’orthographe d’un nom, changements qui apparaitront dans toute autre traduction du livre. En fin de compte, ces résultats m’ont amené à la conclusion qu’une étude rigoureuse du Livre de Mormon requiert le texte le plus précis possible. (Royal Skousen, “Some Textual Changes for a Scholarly Study of the Book of Mormon,” BYU Studies Quarterly 51, no. 4 (2012): 99–100.

En plus de ces trois points, Skousen a identifié des hébraïsmes non-anglais dans le texte du Livre de Mormon, notamment des hébraïsmes dans les premiers manuscrits du Livre de Mormon qui ont ensuite été retirés, apparemment en raison de la lourdeur de ces constructions linguistiques en anglais qui ressemblent à de l’hébreu.

Skousen et son collaborateur de recherche, Stanford Carmack, ont également fait valoir que l’anglais du Livre de Mormon ne doit pas être attribué à l’anglais du 19e siècle, durant l’époque de Joseph Smith, mais plutôt que des locutions d’une période antérieure, dans le développement de la langue anglaise, y sont employées.

L’étude analytique du texte du Livre de Mormon est indispensable pour aider les lecteurs à comprendre la nature des annales néphites et la traduction du Prophète. D’après les récits historiques, Joseph voyait et dictait méthodiquement les mots du texte à son secrétaire. Ces traces de dictée ligne par ligne dans le manuscrit, tel que le montre Skousen, corroborent ces témoignages historiques et indiquent cette mise en évidence d’une traduction “proche” du texte.

L’étude analytique du texte a été utile non seulement pour clarifier les passages qui peuvent prêter à confusion, résultant d’erreurs de transcription, mais elle a aussi permis d’identifier et d’expliciter les endroits où les éditeurs ont cherché à apporter des améliorations stylistiques dans le texte.

Un exemple de cela peut être constaté dans les paroles de Moroni vers la fin de la page de titre du livre de Mormon citées plus haut, au début de cet article. Tandis que l’édition de 1830 du Livre de Mormon dit “s’il y a des fautes, c’est la faute des hommes”, l’édition de 1837 du Livre de Mormon, éditée par Joseph Smith lui-même, a été modifiée pour dire “s’il y a des fautes, ce sont les erreurs des hommes”. Il semblerait que le Prophète a fait cette modification pour rendre le passage plus lisible.

En fin de compte, l’étude de Skousen démontre que le Livre de Mormon a été donné avec une cohérence et un soin incroyable. Cela confirme ce que le Seigneur a dit à Oliver Cowdery en juin 1829, le même mois où la traduction du Livre de Mormon a été achevée : “Voici, je t’ai, en de nombreuses occasions, manifesté par mon Esprit que les choses que tu as écrites sont vraies. Tu sais donc qu’elles sont vraies. Et si tu sais qu’elles sont vraies, voici, je te donne le commandement d’avoir confiance dans les choses qui sont écrites. Car c’est là que sont écrites toutes choses concernant les fondements de mon Église, de mon Évangile et de mon roc” (Doctrine et Alliances 18: 2-4).

Les “choses que [Oliver] a écrites” dont il est question dans ce passage incluent bien évidemment le Livre de Mormon. Grâce aux recherches de Skousen, les saints des derniers jours ont des confirmations de même que le témoignage de l’Esprit qu’ils peuvent en effet “se fier” au Livre de Mormon, comme témoin fiable et fondement scripturaire solide. Skousen reconnaît que “des erreurs se sont glissées dans le texte, mais aucune de ces erreurs n’entrave de manière significative le message du [Livre de Mormon] ou sa doctrine. Ces erreurs textuelles n’ont jamais empêché les lecteurs du Livre de Mormon de recevoir leur témoignage personnel de sa vérité”. En tant que tel, “toute cette inquiétude sur le nombre de changements [dans le Livre de Mormon] est spécieuse. … La parole de Dieu transparaît … dans le Livre de Mormon, malgré les erreurs occasionnelles dues à sa transmission.” (Royal Skousen, “Changes in The Book of Mormon,” Interpreter: A Journal of Mormon Scripture 11 (2014): 172).

On peut en conclure avec certitude que l’authenticité du Livre de Mormon est soutenue par les témoins de chair et de sang du Livre de Mormon, tels que Martin Harris et David Whitmer, ainsi que le témoignage fait d’encre et de papier que sont les manuscrits du Livre de Mormon.

Lectures complémentaires (en anglais)

Les nombreuses recherches de l’étude analytique du texte du Livre de Mormon par Royal Skousen peuvent être consultées sur bookofmormoncriticaltext.byustudies.byu.edu et sur le site de la Fondation Interpreter.

Pour un résumé pratique des résultats les plus significatifs du projet d’analyse textuelle, voir Royal Skousen, “Some Textual Changes for a Scholarly Study of the Book of Mormon”, BYU Studies, 51 no. 4 (2012), 99-117.

De plus, voir Royal Skousen, ed., The Book of Mormon: The Earliest Text (New Haven, CT: Yale University Press, 2009).