En octobre 2017, ce qui se fait de mieux en termes de leçon de choses a été installée à BYU, entre la Kimball Tower et le Joseph Smith Building (JSB). C’est une maquette grandeur nature du Tabernacle de Moïse, avec un autel des holocaustes et l’arche de l’alliance. Au cours de visites guidées, les étudiants de BYU et les membres de la collectivité y découvrent les rites anciens qui avaient lieu dans le tabernacle biblique, et les liens entre les sacrifices d’animaux, l’encens brulé et la menora, et les croyances des Mormons.
La maquette a été créée par des membres des pieux de Huntington Beach et Murrieta en Californie, qui firent appel à Donald W. Parry, professeur de la Bible hébraïque et des manuscrits de la mer Morte, pour les guider dans la fabrication du tabernacle. Après l’avoir utilisé pour des conférences de jeunesse et des portes ouvertes, les pieux californiens ont prêté le Tabernacle à d’autres pieux et organisations à travers le pays, avec un passage par BYU.
Bien que les billets pour les visites soient vite partis, les visiteurs du campus peuvent encore découvrir le Tabernacle de l’Ancien Testament dans une exposition installée dans le hall du JSB. On peut notamment y voir des modèles 3D créés par I. Daniel Smith (BS, 2007, MPA, 2010) et Brian Olson.
Avec les solides connaissances en études bibliques et proche-orientales présentes à BYU, nous avons demandé à Parry et à d’autres professeurs de la faculté de religion de nous éclairer sur six éléments incontournables du Tabernacle.
- L’autel des holocaustes
Professeur Parry : Dans la loi de Moïse, il existait un ensemble complexe d’offrandes sacrificielles, qui étaient pratiquées à l’autel des holocaustes et, plus tard, au temple de Jérusalem. Selon le type de sacrifice, les offrandes pouvaient être des chèvres, des moutons, ou des bovins, mâles ou femelles et sans défaut. Les offrandes de grains pouvaient se faire sous forme de farine ou de céréales (parfois avec de l’huile), de sel, ou d’encens. Le miel ou le levain étaient interdits.
La plupart des sacrifices se déroulaient en six étapes cérémoniales :
- Présentation du sacrifice à la porte du temple ou sur le côté nord de l’autel.
- Imposition des mains sur la victime sacrificielle. Le fidèle ou le prêtre impose ses mains sur le sacrifice pour consacrer l’offrande à Dieu et pour faire du sacrifice un substitut de celui qui fait l’offrande.
- L’animal est tué.
- Le sang est aspergé et répandu. Pour la plupart des sacrifices d’animaux, le prêtre récupérait le sang de l’animal et en aspergeait une partie sur les côtés de l’autel et versait le reste à sa base.
- Le sacrifice est brûlé. Selon le sacrifice, le prêtre brûlait une partie ou la totalité de l’animal sur l’autel.
- Partage du repas sacrificiel.
En tant que disciple de Jésus-Christ et étudiant des écritures, j’observe des éléments importants relatifs au Christ et à son expiation dans les six étapes de ces sacrifices, qui étaient offerts comme « une similitude du sacrifice du Fils unique du Père » (Moïse 5:7). Prenez la deuxième étape, par exemple : quand l’officiant du temple (le prêtre ou le grand-prêtre) imposait ses mains sur la tête d’un animal, il transférait symboliquement les péchés des hommes à l’animal ; puis l’animal était tué à la manière établie. Dans un sens, l’acte d’imposer ses mains servait d’intermédiaire entre l’homme et l’animal. Ainsi, le verset dit : « Aaron posera ses deux mains sur la tête du bouc vivant, et il confessera sur lui toutes les iniquités des enfants d’Israël et toutes les transgressions par lesquelles ils ont péché ; il les mettra sur la tête du bouc » (Lévitique 16:21, voir aussi Lévitique 1:4). L’imposition des mains sur les animaux sacrifiés symbolise le sacrifice divin de Jésus-Christ, quand il a pris sur lui tous nos péchés et toutes nos iniquités. Cet acte divin et infini a des conséquences éternelles pour moi personnellement.
- La cuve
Camille Fronk Olson (MA, 1986, Doctorat, 1996), professeur d’écriture ancienne : La cuve était placée sur le parvis extérieur entre l’autel des holocaustes et la porte du tabernacle. La propreté était essentielle pour se trouver en la présence de Dieu. Dans la pratique, les prêtres avaient souvent besoin de se laver par rapport à leur rôle dans le sacrifice des animaux. Spirituellement, le rituel signifiait être libéré du sang, de la souillure et des impuretés du péché et du monde. De cette façon, les prêtres présentaient les sacrifices et eux-mêmes devant Dieu en étant purs et saints.
Le Nouveau Testament identifie les façons dont Jésus-Christ peut personnifier certains aspects du tabernacle et des temples ultérieurs. Ces liens avec le Christ font échos chez les Saints des Derniers Jours puisque nous croyons que « tout rend témoignage de [lui] » (Moïse 6:63). Nous avons en Jésus-Christ un « tabernacle plus grand et plus parfait, qui n’est pas construit de main d’homme, c’est-à-dire, qui n’est pas de cette création » (Hébreux 9:11), de qui nous « approchons avec … le corps lavé d’une eau pure » (Hébreux 10:22). Comme les prêtres de l’Ancien Testament, nous nous présentons devant Dieu seulement après qu’il nous a purifiés. Quelques heures avant sa crucifixion, Jésus lava les pieds de ses douze apôtres dans un rituel qui pouvait les purifier comme ils n’auraient pu le faire eux-mêmes (voir Jean 13:1-17). De même, le rituel d’immersion dans les eaux du baptême qui nous lavent, symbolise le pouvoir purificateur du Seigneur qui nous purifie au-delà de ce que l’eau seule le peut.
- La menora
David Rolph Seely (BA, 1981, MA, 1982), professeur d’écriture ancienne : Le chandelier d’or, ou la menora, est décrit dans Exode 25:31-40. Il était fait d’or pur, et les termes d’amandier avec ses branches, ses bourgeons et ses fleurs sont utilisés pour le décrire. La Bible ne précise pas sa taille, mais la tradition orale juive affirme qu’il faisait un peu plus d’un mètre cinquante (le Talmud babylonien Menahot 28b). La menora avait un axe central avec trois branches de chaque côté, l’extrémité de chacune était en forme de coupe qui était remplie d’huile d’olive pure qui faisait office de lampe. Les sept lampes avaient pour fonction d’éclairer le lieu saint dans le tabernacle.
Dans l’Ancien Testament, l’huile d’olive est liée à l’Esprit. Quand Saül et David furent oints avec de l’huile d’olive, l’Esprit vint sur eux (voir 1 Samuel 10:1-10 ; 16:13). L’huile dans les lampes des dix vierges (voir Matthieu 25:1-13), comme elle est décrite dans les Doctrine et Alliances, représente le Saint-Esprit (voir D&A 45:56-57). Et l’onction de Jésus est décrite comme étant faite par le Saint-Esprit (voir Actes 10:38).
Il n’y a pas dans la Bible d’explication précise des symbolismes de la menora. Cependant, les traditions juives et chrétiennes ont proposé de nombreuses interprétations. Certains commentateurs juifs ont expliqué qu’elle était le symbole de la connaissance des hommes guidée par la lumière de Dieu. Il existe aussi des traditions juives associant la menora à l’arbre de vie. On pensait que les sept lampes représentaient les sept jours de la création et les sept jours de la semaine. Philo et Josephus, des historiens juifs quasi contemporains du Christ, imaginaient que la lampe centrale symbolisait le soleil, tandis que les six autres représentaient la lune et les planètes. Le livre apocryphe Ben Sira décrivit la lampe centrale comme une métaphore pour Sarah et sa vertu qui rayonne (voir 26:16-17). Dans la tradition chrétienne, Jésus se décrit lui-même comme étant « la lumière du monde » (Jean 8:12; voir aussi Jean 1:9), ce qui a pu être une référence à la menora. Le livre de l’Apocalypse contient une vision dans laquelle les sept lampes représentent les sept églises (voir 1:12,20).
- La table des pains de proposition
George A. Pierce, professeur assistant d’écriture ancienne : La table des pains de proposition était l’un des trois éléments (avec l’autel des parfums et la menora) qui se trouvait dans le lieu saint du tabernacle. Les matériaux dans lesquels elle était faite, du bois recouvert d’or pur (voir Exode 25:23-30), et son emplacement dans la structure, dénote de son importance dans le rituel du tabernacle : les rites menés en extérieur utilisant l’autel des holocaustes et la cuve de bronze étaient orientés vers les individus, tandis que le culte pratiqué dans le lieu saint était centré sur le peuple d’Israël dans son ensemble.
Le pain sur la table, que l’on pourrait traduire de l’hébreu lehem hapanim par « pain de la présence », symbolise le peuple d’Israël dans son ensemble et son alliance avec le Seigneur. Il sert à rappeler qu’Israël a besoin de la présence de Dieu pour être nourri. Les prêtres préparaient douze pains chaque semaine et les plaçaient sur la table chaque jour du Sabbat (voir Lévitique 24:5–9). Les vieux pains étaient retirés de la table et mangés par les prêtres dans un acte de communion entre Dieu et le peuple d’Israël. Bien que de nombreuses interprétations chrétiennes de la table des pains de proposition mettent en avant l’enseignement de Jésus sur « le pain de vie » (Jean 6:35), le contexte de la déclaration de Jésus fait plutôt référence à la manne qui fut donnée à Israël dans le désert. Les Chrétiens et les Saints des Derniers Jours en particulier, voient plutôt dans la table et les douze pains une métaphore du rassemblement d’Israël en la présence du Seigneur, et la consommation du pain par les prêtres comme un symbole du pain de la Sainte-Cène mangé en souvenir du Sauveur et de son sacrifice expiatoire.
- L’autel des parfums
Shon D. Hopkin (BA, 1997, MA, 2001), professeur associé d’écriture ancienne : On trouve une description de l’autel des parfums dans Exode 30:1–10. Il était placé dans le lieu saint, juste avant le voile qui séparait la pièce du saint des saints. Il était fait de bois recouvert d’or. Il y avait une corne recouverte d’or à chaque coin, qu’on retrouvait aussi sur l’autel des holocaustes, et qui symbolisaient vraisemblablement le pouvoir de Dieu (voir, par exemple, Deutéronome 33:17 ; 1 Samuel 2:10).
Sur cet autel, les prêtres brûlaient de l’encens tous les jours, avec le charbon apporté de l’autel des holocaustes. L’encens brulé était le point culminant des services matinaux et vespéraux. Le moment où le prêtre brulait l’encens était celui où il donnait sa bénédiction sacerdotale. L’autel des parfums représentait le lieu de prière dans le tabernacle, comme indiqué dans Apocalypse 8:4 : « La fumée des parfums monta, avec les prières des saints, de la main de l’ange devant Dieu ».
Dans le Nouveau Testament, Zacharie était choisi pour conclure l’un des services sacrificiels matinaux. Il se tenait devant l’autel des parfums, en prière, quand l’ange Gabriel lui apparut pour lui annoncer la naissance de Jean-Baptiste (voir Luc 1:5-17). Ainsi l’ange apparut au serviteur de Dieu à l’endroit de la prière sacrée, devant le voile sur lequel des chérubins étaient cousus, avec un message des vérités de l’évangile rétabli que Zacharie devait choisir d’accepter ou de rejeter. Cette révélation par l’intermédiaire d’un messager divin a, en réalité, ouvert la dispensation du midi des temps, en particulier quand Zacharie choisit plus tard d’accepter le message et que sa bouche fut ouverte pour prophétiser au peuple (voir Luc 1:63-79).
- L’arche de l’alliance
Professeur Seely : L’arche de l’alliance est décrite dans Exode 25:10–22. C’était un coffre en bois d’acacia recouvert d’or à l’extérieur et à l’intérieur. Il mesurait 1,24 m de longueur, et 0,68 m de largeur et de hauteur. Elle était équipée d’anneaux dans lesquels des barres étaient insérées pour la transporter. Au-dessus du coffre, il y avait un couvercle en or appelé propitiatoire (siège de la miséricorde en anglais) ; à chaque extrémité de ce couvecle étaient posés deux chérubins se faisant face. Les chérubins étaient des créatures composites que l’on retrouve aussi dans d’autres anciennes cultures du Proche-Orient, et dont le rôle était de garder les trônes et les lieux sacrés.
Selon la Bible, l’arche de l’alliance avait deux fonctions. Elle était considérée comme étant le trône du Seigneur, qui s’asseyait entre les chérubins (voir 1 Samuel 4:4 ; 2 Samuel 6:2). Elle symbolisait ainsi la présence de Dieu et elle était placée dans le saint des saints, dans lequel uniquement le grand-prêtre entrait, une seule fois par an, le jour de l’expiation. L’arche servait aussi de réceptacle pour l’alliance, d’où son nom, représentée par les deux tables de pierre sur lesquelles étaient inscrits les Dix commandements. Enfin, selon Deutéronome, un rouleau contenant une copie de la loi (voir Deutéronome 31:26) était placé à côté de l’arche, ainsi qu’un vase de manne (voir Exode 16:33-34), et la verge d’Aaron (voir Nombres 17:1-11). Les enfants d’Israël apportèrent l’arche de l’alliance en terre promise, et elle fut finalement installée dans le saint des saints du temple de Salomon au Xème siècle av. JC. Elle a probablement été détruite quand le temple fut brulé par les Babyloniens en 586 av. JC.
Tous les ans, le jour de l’expiation, ou Yom Kippour, le grand-prêtre prenait du sang d’un animal sacrifié sur l’autel dans le tabernacle. Après avoir passé le voile, il aspergeait le sang sur le propitiatoire en symbole de la réconciliation entre Dieu et son peuple (voir Lévitique 16). William Tyndale, réformateur protestant du XVIème siècle, inventa le mot anglais atonement (expiation), enchaînement des mots at-one-ment, pour décrire le moment de la réconciliation entre Dieu et son peuple. Ce mot en tant que nom commun et verbe (expiation ou expier) est essentiel dans les réflexions juives sur la loi de Moïse et sur la rédemption de Jésus-Christ pour les Chrétiens. C’est aussi un mot très présent dans le Livre de Mormon.
Dans l’épitre aux Hébreux, chapitres 8 et 9, Jésus et son expiation sont longuement expliqués par rapport au rôle du grand-prêtre le jour de l’expiation, Yom Kippour. Jésus, comme le grand-prêtre, apporta son propre sang en sacrifice et en l’aspergeant sur le propitiatoire, il permit à tous les hommes de retourner en la présence de Dieu. Par conséquent, pour les Chrétiens, l’arche de l’alliance devient un symbole essentiel à la compréhension doctrinale de l’expiation de Jésus-Christ.
La vidéo ci-dessous a été produite par le pieu de Huntington Beach.
Article publié sur BYU Magazine et traduit par Christine.tem