Alors que l’ouragan Matthew a fait rage sur les côtes de Floride, beaucoup d’entre nous réévaluent leur état de préparation à une situation d’urgence. Mais bien que la nourriture et l’eau soient d’une importance critique dans une catastrophe, ils ne sont pas suffisants. Une étude récente montre que la façon avec laquelle vous réagissez pendant et après une catastrophe peut faire le plus de différence pour votre survie.
Comme les animaux, les humains possèdent de forts réflexes de survie. Malheureusement, les gens choisissent souvent le mauvais réflexe, paralysés comme une biche dans le faisceau des phares d’une voiture au pire moment possible. Prenons l’exemple du naufrage du M.V. Estonia dans la mer baltique le 28 septembre 1994.
Le ferry rempli de voitures portait 989 personnes sur son parcours habituel allant de Tallinn en Estonie, à Stockholm en Suède, lorsque la porte du pont des voitures s’est ouverte. L’eau a rapidement envahie le navire, le coulant en moins d’une heure. Seulement 137 personnes ont survécu, dont le passager britannique Paul Barney, qui a dit que pendant que le navire sombrait, beaucoup de gens sont restées assis choqués, incapables de bouger. Il a dit à au journal l’Observer : « Je me disais sans arrêt : ‘Pourquoi n’essaient-ils pas de sortir ?’ »
Laurence Gonzales, auteur du bestseller Deep Survival, a passé plus de trois décennies à analyser les histoires de survivants pour savoir qui survit, qui meurt, et pourquoi. Sa conclusion : « Personnalité, émotion, attitude, et la façon avec laquelle les gens font face à l’adversité sont plus déterminants pour la survie que n’importe quel type d’équipement. »
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Préparez-vous et entrainez-vous
Le psychologue SDJ Dr. Elia Gourgouris et Dr Terry Lyles, l’un des meilleurs experts en réaction traumatique, ont passé deux ans à former les employés du contrôle spatiale américain à faire face plus efficacement aux catastrophes potentielles. Leur formation comportait de nombreux aspects, dont des mises en situations réelles.
« L’un des meilleurs moyens de former l’esprit à bien réagir sous pression est de pratiquer physiquement à l’avance », dit Gourgouris
« Plus vous êtes préparé, moins vous serez paniqué quand les choses se passent mal », dit Lyles. Mais vous devez vous entrainer, ce n’est pas assez de le savoir. »
Amanda Ripley, auteur de The Unthinkable: Who Survives When Disaster Strikes, and Why, attribue le sauvetage de 2687 personnes dans la tour 2 lors des attaques du 11 septembre à Rick Rescorla, chef de sécurité de Morgan Stanley au World Trade Center. Elle écrit :
« Rescorla a commencé à appliquer à toute l’entreprise ses exercices surprises fréquents de simulations d’incendies. Il a formé les employés à se regrouper dans le hall entre les cages d’escalier et à descendre les escaliers deux par deux jusqu’au 44eme étage. »
Lorsqu’il a vu que la Tour 1 brulait, Rescorla « a immédiatement commencé à commander aux employés de Morgan Stanley de sortir. Ils ont réagi superbement. Ils savaient déjà quoi faire… Quand la tour s’est effondrée, seulement 13 collègues de Morgan Stanley, dont Rescorla et quatre de ses officiers de sécurité, étaient à l’intérieur. »
D’autres gens auraient pu s’en sortir s’ils avaient participé à des exercices d’évacuation semblables. Mais dans la panique, les gens ont commencé à courir vers le haut de la tour avec l’espoir qu’un hélicoptère viendrait les sauver, mais ont trouvé les portes fermées.
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Restez calme et adaptez-vous rapidement à la situation
« Il a été prouvé que si vous mettez quelqu’un dans une situation de stress, il ne pourra pas résoudre un problème mathématique simple ni se souvenir d’une série de mots », dit Gonzales. « En réalité, perdre votre calme vous rend stupide. C’est une simplification excessive, mais les émotions et la raison fonctionnent en dent de scie. Plus hautes sont les émotions, plus basse sera votre capacité à raisonner, mais c’est la raison qui va vous sortir d’une mauvaise situation. »
Alors comment rester calme dans un chaos soudain ?
Al siebert, auteur de The Survivor Personality, a écrit : « Votre façon naturelle de réagir aux évènements de tous les jours influence vos chances de survivre lors d’une crise. »
En d’autres termes, entrainez-vous à rester calme dans des situations de stress, telles que conduire dans les embouteillages ou rendre un travail à la dernière minute, et vous serez plus à même de rester calme lors d’une situation d’urgence.
Gonzales ajoute : « Les gens qui seront doués pour la survie seront affectées lorsque quelque chose de mal se passe, mais ils retrouveront rapidement le contrôle émotionnel et commenceront à comprendre la nouvelle réalité et comment ils doivent l’appréhender.
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Sortez de votre zone de confort
L’un des meilleurs moyens de vous entrainer à vous adapter rapidement est de mettre votre esprit à l’épreuve de tâches nouvelles et non familières. Les études montrent que quelque chose d’aussi simple que d’apprendre une langue étrangère ou un nouvel instrument de musique peut aider à réinitialiser votre cerveau et rendre plus facile le fait de vous acclimater à une nouvelle situation.
« Vivre dans un environnement sans risques amoindri nos capacités », dit Gonzales. « Nous devons faire des efforts pour apprendre de nouvelles choses. »
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Aidez les autres
Le professeur de psychologie à l’université de Lancaster John Leach a écrit dans son livre Survival Psychology qu’au cours de catastrophes, les docteurs et les infirmières ont des taux de survie supérieurs parce qu’ils essaient d’aider les autres. Selon Gourgouris, aider quelqu’un d’autre, même si vous n’avez pas de formation médicale, peut vous aider à survivre.
« Aider les gens vous aide à vous sentir utile », dit-il. « Quelque chose d’aussi simple que de réconforter un enfant peut vous faire sentir utile, parce que vous faites quelque chose. Autrement, il est facile de rester dans un état de choc, avec le regard dans le vide sans faire quoi que ce soit. »
De même, Gonzales dit qu’il est extrêmement important de s’occuper de quelqu’un d’autre que vous-même, même si cette personne n’est pas avec vous. « Dans beaucoup de situations de survie que j’ai étudiées, les survivants disent qu’ils pensaient à leur mère ou leur enfant, quelqu’un pour qui ils devaient continuer à vivre. Donc la conclusion est, plus vous êtes connecté socialement, mieux vous vous en sortez dans des situations de survie. »
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Divisez chaque tâche en plus petites étapes
Selon Gonzales, l’un des meilleurs moyens de faire face à une catastrophe est avec des activités organisées et dirigées. « Ça vous aide à réfléchir », dit-il. « Dans l’un des cas que j’ai étudié, il s’agissait d’un homme qui skiait seul quand il s’est cassé la jambe. Il a dû se trainer pendant cinq jours avant de trouver de l’aide. Pour traverser l’épreuve, il a divisé (son périple) en cent mouvements à la fois, et chaque centaine de mouvements était dédié à quelque chose ou quelqu’un qu’il aimait dans sa vie. »
John Leach, qui a dirigé les études sur les éléments mentaux, émotionnels et psychologiques de la survie, écrit : « Les discussions avec des survivants montrent régulièrement qu’ils possèdent la capacité de diviser l’évènement auquel ils ont dû faire face en tâches plus petites et atteignables. Chaque étape, chaque morceau, doit être aussi simple que possible… Une action simple et dirigée est la clé pour récupérer des fonctions psychologiques normales. »
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Restez positif
Les experts sont d’accord pour dire qu’une attitude positive peut avoir un fort impact sur la récupération après un évènement traumatisant.
« La gratitude est une merveilleuse manière de donner un sens à la vie », dit Lyles.
« Même quand une tragédie arrive, si vous arrivez à être reconnaissant pour ce qui arrive et pour l’opportunité d’apprendre, cela donnera un sens à votre vie. »
« Posez des questions simples comme : ‘Pourquoi suis-je reconnaissant ?’ » conseille Gourgouris. « Cela parait être une question étrange, mais au lieu de vous focaliser sur ce que vous avez perdu, vous concentrer sur vos bénédictions provoque une réaction positive. En temps de crise, concentrez-vous sur les succès que vous avez eu. Cela vous donnera de l’espoir et de la force pour le jour suivant. »
Dans les études dirigées par le professeur en psychologie de l’université de Stanford Carol Dweck, les gens ayant une attitude positive semblent pouvoir surmonter les obstacles et s’adapter aux nouvelles situations plus rapidement que les autres. Elle fait référence à « un état d’esprit de croissance », indiquant l’attitude des gens qui ne se découragent pas facilement et qui acceptent de commettre des erreurs.
« Certaines personnes ont l’état d’esprit de victimes, ils ont le monde sur le dos, dit Gonzales. « L’autre état d’esprit est de penser qu’il est possible de contrôler son comportement ainsi que ce qui se passe dans sa vie, contrôler son destin dans une large mesure. Ils pensent ‘Voilà une mauvaise situation, que puis-je faire maintenant pour non seulement y faire face, mais peut-être la tourner à mon avantage ?’ Pour ceux qui se voient en victimes, c’est une bonne idée de commencer à s’entrainer à voir les choses d’une manière différente. »
L’après coup émotionnel
Les catastrophes naturelles laissent plus derrière elles qu’une destruction physique, elles laissent des cicatrices émotionnelles aux survivants et aux sauveteurs. Gourgouris dit que la réaction émotionnelle classique après une catastrophe inclus des sentiments de panique, de désespoir, de colère, et d’isolement. « Les sentiments comme ceux-là sont naturels après un traumatisme, mais il est très important de les traiter.
Lyles, qui a aidé des gens après le 11 septembre et après l’ouragan Katrina, dit qu’accepter vos sentiments suite à un évènement traumatisant est la première étape vers la guérison. « La fausse idée est que vous vous en remettrez avec le temps », dit-il. « Mais vous devez vous désintoxiquer, ou cela restera dans votre tête. »
Lyles conseille d’écrire une lettre pour parler de l’expérience, en expliquant tous les détails et tous vos sentiments, puis de la bruler. « Faites-le encore et encore jusqu’à ne plus avoir besoin d’écrire », dit-il.
« C’est un exutoire émotionnel, comme vomir émotionnellement et débarrasser votre esprit du poison. »
De toutes les émotions difficiles à vivre pour les survivants, la culpabilité est sans doute la plus difficile et aussi la moins facile à comprendre pour les autres. « Après la fusillade de Columbine, j’ai aidé les étudiants du lycée à gérer ce qu’ils avaient vécu », se souvient Gourgouris. « Une fille se sentait coupable de ne pas avoir été là parce qu’elle était chez le médecin. Elle se demandait « Pourquoi moi ? Pourquoi suis-je vivante ? »
Bien que ce soit difficile, Lyles dit qu’il est vital pour les survivants de surmonter la culpabilité et d’aller de l’avant, en étant reconnaissant d’être en vie. « Le plus dur dans le fait de revenir d’une tragédie est d’en revenir », dit-il. « Les gens du 11 septembre continuent à se poser la question à ce jour. ‘Pourquoi ai-je survécu alors que la personne à côté de moi est morte ?’ C’est la même chose avec les autres catastrophes. Il n’y a pas de réponses, mais vous devez aller de l’avant et accepter la réalité et le fait que vous avez survécu. »
Aider les enfants à faire face
Lyles et Gourgouris recommandent des techniques spécifiques pour aider les enfants à faire face à leurs émotions après un évènement traumatisant. Ayant récemment été en Haïti pour travailler avec les enfants, les deux psychologues disent avoir essayé plusieurs méthodes dont la discussion, l’écriture, le dessin décrivant leurs expériences.
Après le tsunami dévastateur de 2004, Lyles a passé du temps en Thaïlande pour aider les enfants à se remettre de cette catastrophe. « J’allais dans les camps de réfugiés pour aider les enfants qui avaient perdu leurs parents. Ils étaient juste assis là, hagards, ne mangeant pas, ne jouant pas », se souvient-il. « A l’aide d’un traducteur, j’ai commencé à leur demander de faire des dessins. Les enfants ne sont pas aussi doués pour s’exprimer et écrire que les adultes, alors je leur ai demandé de dessiner, puis de décrire leurs dessins à quelqu’un. Nous avons suspendu les dessins avec une ficelle entre les palmiers. Une fois que les enfants ont commencé à extraire les expériences d’eux-mêmes et à les partager avec les autres, ils ont recommencé à jouer au football et à redevenir des enfants. »
Gourgouris met en garde les parents de ne pas forcer de méthode particulière sur leur enfant. « Vous devez être souple », conseille-t-il. « Tous les enfants ne veulent pas parler. Selon leur âge, leur maturité émotionnelle et leur désir de s’ouvrir, vous pourriez les faire écrire ou faire un dessin de leur expérience. Chacune de ces méthodes peut aider les enfants à se remettre plus rapidement. » Vous pouvez également trouver des conseils pour réconforter des enfants après un traumatisme sur le site internet fema.gov.
Les catastrophes peuvent arriver partout et à tous moments. Si vous traversez un désastre, sachez que la confusion et la douleur sont inévitables. Mais avoir un plan, et connaitre ce plan comme sa poche, vous apportera de la tranquillité et augmentera de façon exponentielle vos chances de vous en sortir. Grâce aux outils physiques, mentaux et émotionnels adaptés, l’impensable peu, en effet, être surmonté.
Réactions des enfants aux catastrophe selon leur âge
Voici ci-dessous des réactions typiques d’enfants suite à des catastrophes ou des évènements traumatisants.
De la Naissance à 2 ans : Avant de pouvoir parler, les enfants ne peuvent pas décrire les évènements ni leurs sentiments. Cependant, ils peuvent se souvenir de certaines images, sons ou odeurs. Quand les enfants grandissent, ils peuvent jouer à refaire les scènes des évènements qui se sont passés plusieurs années auparavant et qui semblaient oubliés.
De 3 à 6 ans : Les enfants de cette tranche d’âge se sentent souvent impuissants après une catastrophe. Par conséquent, ils craignent beaucoup le fait d’être séparés de ceux qui s’occupent d’eux. Les enfants de cet âge ne peuvent pas comprendre le concept de perte définitive. Dans les semaines suivants un évènement traumatisant, les enfants de maternelle peuvent jouer à refaire les scènes de la catastrophe encore et encore.
De 7 à 10 ans : L’enfant scolarisé a la capacité de comprendre l’irréversibilité d’une perte. Certains enfants deviennent très préoccupés par les détails d’un évènement traumatisant et veulent en parler sans arrêt. Cette préoccupation peut gêner la concentration de l’enfant à l’école, et les résultats peuvent s’en trouver affectés. Ils peuvent montrer un large éventail de réactions, tristesse, nervosité, crainte que la catastrophe se reproduise, culpabilité pour ce qu’ils ont fait ou pas fait pendant la catastrophe, colère que l’évènement n’ait pas pu être évité, ou jouer au sauveteur.
De 11 à 18 ans : Les enfants de cette tranche d’âge réagissent aux catastrophes presque comme les adultes. Pour y faire face, les adolescents peuvent adopter des comportements dangereux et prendre des risques tels que conduire imprudemment. D’autres peuvent avoir peur de quitter la maison. Un adolescent peut se sentir submergé par des émotions intenses tout en se sentant incapable d’en parler avec les autres.
L’article d’origine a été écrit par Jamie Armstrong et été publié pour ldsliving.com, avec comme titre “The Psychology of Survival: 6 Tips for Mentally and Emotionally Preparing Your Family for a Disaster” Français ©2016 LDS Living, A Division of Deseret Book Company | English ©2016 LDS Living, A Division of Deseret Book Company –